Le renouveau des bals popu à la parisienne
En plus de renseigner les accordéoniste sur leur instrument de musique, GuideAccordéon s'est aussi donné comme "mission" de faire la promotion du style musette, de l'accordéon musette et du patrimoine mondial que représente le folklore urbain "musette de Paris".
C'est pour cette raison que nous nous réjouissons de constater un engouement pour le musette et que nous publions volontiers des articles qui en témoignent comme celui-ci paru dans le Monde le 1er octobre 2012.
Il est signé Jean-Jacques Larrochelle.
Que les Japonais victimes du Pari sho-ko-gun (le syndrome de Paris) se rassurent. Pour qui sait chercher, l'univers d'Amélie Poulain et des boules à facettes existe bel et bien dans la Ville Lumière. Le renouveau des bals - paso, valse musette, tango, forro, swing ou java que l'on danse à deux, ça va de soi -, en est le témoignage le plus probant.
La Sacem, qui élabore des forfaits de droits d'auteur pour ces événements, souligne la tendance.
Si, depuis 2005, les bals connaissent une régression continue en milieu rural, c'est à l'inverse dans les régions Nord et Ile-de-France que la société des auteurs compositeurs réalise ses recettes les plus importantes.
Hormis les guinguettes des bords de Marne, rarement à la hauteur de leur réputation festive, les lieux se multiplient à Paris permettant de se replonger dans une atmosphère pas si ringarde que cela.
Silhouette pulpeuse, tailleur noir et taille fine, lèvres écarlates et choucroute généreuse, Mélina Sadi, alias la "Bâronne d'Paname" - avec un accent circonflexe pour en souligner le tropisme parigot - se vit comme "une résistante". Et de rappeler que durant la Seconde Guerre mondiale, l'anticonformisme des zazous, de jeunes excentriques fans de swing, hérissait le poil des factions vichystes.
"Paris a un problème avec sa mémoire"
C'est à Charleville-Mézières (Ardennes), où elle est arrivée d'Algérie étant petite, qu'elle tombe sous le charme des danses à deux. "Quand je voyais mes voisins au bal, je les trouvais tous beaux. Je voulais que la vie soit un bal permanent." Issue d'un milieu humble, elle s'est attribué un titre de noblesse pour valoriser son appartenance sociale. "Paris a un problème avec sa mémoire, souligne l'élégante. L'aristocratie populaire a longtemps défini l'image de la ville. Il faut être novateur, certes, mais aussi savoir regarder derrière soi."
On a la chance d'avoir une rivière dans la ville, et pourtant, il n'y avait pas de guinguette à Paris Plages, pas de bal popu à la parisienne |
La Bâronne ne s'épargne pas. En 2007, à la Villette, elle installe une guinguette avec orchestre ou sono, c'est selon, et surtout son indispensable parquet. "On a la chance d'avoir une rivière dans la ville, et pourtant, il n'y avait pas de guinguette à Paris Plages, pas de bal popu à la parisienne", déplore-t-elle. Balapaname, l'association qu'elle a créée à l'époque, a comblé ce vide.
ÉTABLIR LE CONTACT
Lors de ces rendez-vous, les générations se mêlent. Des ados, venus avec l'idée de railler ces danseurs d'un autre âge, finissent par se prendre au jeu. "Dans le bal, les moyens de communication relèvent d'un savoir-faire hors de tout référencement social", souligne Christophe Apprill, auteur de Sociologie des danses de couple (éd. L'Harmattan, 2005). Pour le chercheur, "il permet d'établir le contact par le toucher et l'odorat. On n'a pas à parler. C'est une forme idéalisée de concorde. La dimension sensuelle des corps est mobilisée, mais de façon codifiée."
La Bâronne, elle, parle d'énergie.
Les gens rayonnent. Nous voulons croiser les populations, les générations, les cultures et les musiques, décloisonner les univers de danse. |
Fort de l'étude des programmes musicaux que les bals remettent à son organisme, le directeur général de la Sacem, Jean-Noël Tronc, confirme que "le bal qui attire le plus de monde est celui qui crée des passerelles entre les générations : celles qui ont grandi avec Cloclo et Boney M, mais aussi celles qui aiment danser sur des tangos ou des valses".
Pour engager les néophytes dans ce grand écart stylistique, Balapaname peut compter sur ses "ambassadeurs". Vêtus à la mode "swing" (falzar à bretelles, gapette et croquenots bicolores), ils sont le noyau dur de l'association. Leur rôle selon la Bâronne : "Transmettre les savoir-faire de la danse, son vocabulaire". Concrètement, à la moindre hésitation d'un(e) candidat(e) au bord du parquet, ils l'entraînent à bras-le-corps dans les triolets d'un accordéon ou les arpèges d'une guitare jazzy.
Durant l'été, la banlieue nord a tenu le haut du pavé. "Nous avons voulu faire vivre le canal de l'Ourcq, y introduire plus d'art et de culture, explique Daniel Orantin, directeur du comité départemental du tourisme de Seine-Saint-Denis. Avec Mélina, nous avons aussitôt pensé aux bals populaires." A Pantin, au grand air, les Bals Barges ont battu son plein les après-midi de week-end cet été ; le soir, le 6B Quai de Seine, à Saint-Denis, flirtait aussi avec les danses traditionnelles et leurs formes collectives.
Frédéric Goulet, 42 ans, conseiller en marketing digital, danse le rock and roll, le musette et le forro, une danse traditionnelle du Brésil. Également amateur de musiques dites actuelles, il apprécie cet univers qui satisfait, dit-il, son "envie de convivialité." Il assure être "entré dans le réseau des bals" par le biais du Cent-quatre.
Le centre culturel du 19e arrondissement de Paris ne réserve pas ses espaces aux seules créations contemporaines. Sous l'onglet "Art de vivre & bien-être" de son programme, il veut aussi
"dépoussiérer l'image du bal " à la papa ""
Un samedi par mois, où s'invite souvent la Bâronne, le Bal Pop'fait s'entremêler les styles de toutes les époques. Comme lors de chaque rentrée, d'autres lieux parisiens affichent désormais du bal à leur menu. Dans le quartier Oberkampf, tous les derniers dimanches du mois, Balapaname organise son Balnum à l'Alimentation générale (AG pour les intimes).
Le lieu a assis sa réputation grâce au Bal des Martine, un orchestre chauffé à blanc qui mélange les genres au profit des couples dansants et qui va porter tout au long de l'année son message en différents lieux de la banlieue parisienne. Le groupe fêtera la sortie de son nouvel album (Bal Live) le 4 octobre à la Java, dans le 10e arrondissement, où il se produira tous les premiers jeudis du mois. Dans le 20e voisin, à la Bellevilloise, la Bâronne anime aussi ses Ballrooms.
Cet automne, elle compte également y implanter la première Académie du musette. Le projet vise à défendre ce genre hybride, typiquement parisien, et à obtenir son inscription au patrimoine culturel immatériel.
Le musette, ça n'est pas un moment familial, à l'inverse du bal populaire. C'est une musique d'arrière-boutique, une culture de nuit. |
Un genre longtemps réputé canaille, marqué par une forte érotisation. Car la danse à deux, souvent, c'est aussi cela.
Jean-Jacques Larrochelle
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